Droit des étrangers : OQTF

Mis à jour le

13/2/2024

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a donné naissance, le 23 octobre 2020, à une fille qui a été reconnue, le 27 janvier 2021, par un ressortissant français. Le préfet de la Savoie, qui ne conteste pas que Mme A... contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille de nationalité française, soutient néanmoins que la reconnaissance de paternité présentait un caractère frauduleux.

4. Si un acte de droit privé opposable aux tiers est, en principe, opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient cependant à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé. Ce principe peut conduire l'administration, qui doit exercer ses compétences sans pouvoir renvoyer une question préjudicielle à l'autorité judiciaire, à ne pas tenir compte, dans l'exercice de ces compétences, d'actes de droit privé opposables aux tiers. Tel est le cas pour la mise en œuvre des dispositions précitées du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'ont pas entendu écarter l'application des principes ci-dessus rappelés. Par conséquent, si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil, et s'impose donc en principe à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient néanmoins au préfet, s'il dispose d'éléments précis et concordants de nature à établir, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 5° de l'article L. 611-3, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, tant que la prescription prévue par les articles 321 et 335 du code civil n'est pas acquise, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée par la personne se présentant comme père ou mère d'un enfant français.

5. Il ressort des pièces du dossier que, ainsi que le soutient le préfet de la Savoie, le père de l'enfant de Mme A..., qui, d'une part, n'a à aucun moment établi une vie commune avec cette dernière, d'autre part, résidant en région parisienne, n'a eu que très peu de contact avec l'enfant et enfin, n'a effectué qu'un versement de 50 euros le 13 avril 2021 et des achats sommaires les 11 février 2021, 19 février 2021 et 9 juin 2021, ne contribue pas effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant. Toutefois, ces circonstances, si elles prouvent le désintérêt du père français pour son enfant, ne suffisent pas à établir que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention d'un titre de séjour. Il en est de même des autres circonstances invoquées par le préfet, tenant à ce que Mme A... ne s'est pas présentée à la convocation du référent fraude départemental de la Savoie le 10 mai 2021, que la reconnaissance de paternité n'a été effectuée que le 27 janvier 2021, soit plus de trois mois après la naissance de l'enfant, que les parents présentent une grande différence d'âge, qu'une enquête administrative a été diligentée après le dépôt, par l'auteur de la reconnaissance, d'une demande de carte nationale d'identité pour l'enfant et que les déclarations respectives des intéressés ont divergé quant au motif de la fête familiale au cours de laquelle ils se sont rencontrés, quant à la fréquence des visites du père et quant à l'identité de la personne qui a eu l'initiative de demander la carte nationale d'identité. Il s'ensuit qu'en faisant obligation de quitter le territoire français à Mme A..., le préfet de la Savoie a méconnu les dispositions du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

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L'administration n'établit pas le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité

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