Droit des étrangers : OQTF

Mis à jour le

13/2/2024

8. La directive du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres détermine les conditions dans lesquelles ceux-ci peuvent restreindre la liberté de circulation et de séjour d'un citoyen de l'Union européenne ou d'un membre de sa famille. L'article 27 de cette directive prévoit que, de manière générale, cette liberté peut être restreinte pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique, sans que ces raisons puissent être invoquées à des fins économiques. Ce même article prévoit que les mesures prises à ce titre doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées sur le comportement personnel de l'individu concerné, lequel doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. L'article 28 de la directive impose la prise en compte de la situation individuelle de la personne en cause avant toute mesure d'éloignement, notamment de la durée de son séjour, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine.

9. D'une part, aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. ". L'article L. 521-2 du même code dispose que ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que les dispositions de l'article L. 521-3 n'y fassent pas obstacle : " (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ;(...) ; 6° Le ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse qui séjourne régulièrement en France depuis dix ans. ". Enfin, selon l'article L. 521-3 dudit code, dans sa version applicable aux faits de l'espèce : " Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion qu'en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes : (...) 2° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans ; (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et qui, ne vivant pas en état de polygamie, est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; (...). ". Pour l'application de ces dispositions, les années passées en détention au titre d'une peine de privation de liberté ne peuvent s'imputer dans le calcul des dix ans ou vingt ans mentionnés par les dispositions législatives précitées.

10. D'autre part, aux termes de l'article L. 521-5 inséré dans le même code par la loi du 16 juin 2011 afin d'assurer la transposition des dispositions de la directive citée au point 8 du présent arrêt : " Les mesures d'expulsion prévues aux articles L. 521-1 à L. 521-3 peuvent être prises à l'encontre des ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, (...) si leur comportement personnel représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. Pour prendre de telles mesures, l'autorité administrative tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à leur situation, notamment la durée de leur séjour sur le territoire national, leur âge, leur état de santé, leur situation familiale et économique, leur intégration sociale et culturelle dans la société française ainsi que l'intensité des liens avec leur pays d'origine. ". 

11. Les dispositions mentionnées au point 10 du présent arrêt doivent être interprétées à la lumière des objectifs de la directive du 29 avril 2004, notamment de ses articles 27 et 28 mentionnés au point 8. Il appartient à l'autorité administrative d'un Etat membre qui envisage de prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un ressortissant d'un autre Etat membre de ne pas se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, mais d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française. L'ensemble de ces conditions doivent être appréciées en fonction de la situation individuelle de la personne, notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.

12. Il ressort des pièces du dossier que M. B... C... a été condamné une première fois le 15 septembre 2005 par le tribunal correctionnel de Versailles à 500 euros d'amende, avec suspension de permis pendant deux mois pour blessures involontaires avec incapacité n'excédant pas trois mois par conducteur de véhicule terrestre à moteur. Puis, le 26 septembre 2012, la cour d'assises d'appel des Hauts-de-Seine l'a condamné, sur appel de la décision prononcée le 2 mars 2011 par la cour d'assises des Yvelines, à treize ans d'emprisonnement pour viol commis sur deux enfants mineurs de quinze ans du 1er janvier 1985 au 31 décembre 1987, puis du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1993. Enfin, il a été condamné à quatre ans d'emprisonnement pour agression sexuelle sur une mineure de quinze ans au mois d'août 2007 par la cour d'appel de Versailles, sur appel de la décision prononcée le 24 juin 2013 par le tribunal correctionnel de Pontoise. S'il s'est investi dans un projet d'insertion professionnelle depuis qu'il a bénéficié, le 9 juillet 2020, d'une mesure de semi-liberté et d'une réduction de peines, le 20 décembre 2017, l'arrêté en litige est fondé sur le risque pour l'ordre public que représente la présence de M. B... C... en France, eu égard notamment au risque de récidive et à la nature des infractions pour lesquelles il a été condamné. Il ressort du procès-verbal de la commission d'expulsion que cette dernière a émis un avis favorable à l'expulsion de l'intéressé au regard du risque d'atteinte à l'ordre public en raison du risque de récidive en ce qu'il a nié les faits et récidivé même s'il est suivi en prison actuellement par un psychiatre. Cet élément ressort également de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles en date du 25 mars 2014 relatif à sa dernière condamnation qui mentionne que l'intéressé n'a pas reconnu les faits et a émis l'hypothèse d'un complot familial alors que les déclarations de la victime étaient crédibles et constantes pendant la procédure. Une expertise psychologique réalisé au cours de cette procédure a indiqué que le requérant " reste dans ses dénégations et une injonction de soins serait difficile à mettre en œuvre ". Enfin, si l'intéressé a entamé un suivi psychologique comme en atteste le certificat en date du 11 septembre 2020, il est précisé que ce suivi n'a débuté que depuis quelques mois et il ne fait état d'aucune évolution dans le comportement de l'intéressé.

13. Il résulte de ce qui précède qu'eu égard à la nature des faits pour lesquels il a été condamné et au faible degré de conscience de la gravité de ses actes qu'il a témoigné, à la faiblesse de son insertion dans la société française notamment à raison de la durée de son emprisonnement, nonobstant son concubinage avec la mère de ses trois enfants majeurs, et aux liens qu'il a conservés avec son pays d'origine, où il a effectué des séjours réguliers, le préfet a pu, sans commettre d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation de sa situation, estimer que, l'intéressé présentant une menace réelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental pour la société à la date de la décision attaquée, la mesure d'expulsion en litige constituait une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique. Est à cet égard sans incidence la durée de sa résidence régulière en France, eu égard à la durée de ses condamnations d'emprisonnement ferme, d'un montant total d'au moins treize années.

argument(s) que vous pourriez soutenir, en lien avec cette source juridique

L'étranger représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société

Inscrivez-vous gratuitement

Profitez d’une période d’essai de 7 jours sans carte nécessaire pour tester Replick. Choisissez votre plan d’abonnement une fois l’essai terminé.

Je préfère une démo

Vous souhaitez une démonstration en live de Replick pour recevoir toutes les informations nécessaires à son utilisation ?

Réserver un créneau de 15 minutes