🧐 Les femmes, dans leur ensemble, peuvent-elles constituer un “groupe social” pour la reconnaissance du statut de réfugié ?

Oui !

Saisie à titre préjudiciel, la Grande Chambre de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu une importante décision le 16 janvier 2024 dans le domaine du droit d’asile.

👉 En l’espèce, il s’agissait d’une ressortissante turque d'origine kurde, qui, après avoir subi des violences domestiques, s’était soustraite à un premier mariage forcé. Elle avait par la suite contracté un mariage religieux et donné naissance à un fils. Après son départ de Turquie, la requérante avait divorcé de son premier époux. Craignant que sa famille ne la tue en cas de retour en Turquie, elle a donc sollicité l’octroi d’une protection internationale en Bulgarie.

La juridiction bulgare a toutefois décidé d’interroger la Cour sur l’interprétation de la directive 2011/95, l’invitant à préciser les conditions régissant l’octroi d’une protection internationale et le type de protection internationale à accorder dans de telles circonstances.

Des femmes heureuses avec la tête couverte

Trois éléments essentiels ressortent de la décision de la CJUE.

1.- Dans cet arrêt, la CJUE a considéré que les femmes dans leur ensemble pouvaient être considérées comme appartenant à un "groupe social" au sens de la directive 2011/95.

Dans son analyse, la Grande Chambre reprend les conditions classiques permettant d’identifier un groupe social.

Première condition : pour reconnaître l’existence d’un groupe social, les membres du groupe concerné doivent partager au moins l’un des trois traits d’identification énoncés par l’article 10. 1. d) de la directive, à savoir une “caractéristique innée”, une “histoire commune qui ne peut être modifiée”, ou alors une “caractéristique ou une croyance à ce point essentielle pour l’identité ou la conscience qu’il ne devrait pas être exigé d’une personne qu’elle y renonce”.

La CJUE relève que le fait d’être de sexe féminin constitue une caractéristique innée et suffit, partant, à satisfaire cette condition.

Deuxième condition : afin de qualifier l’existence d’un groupe social, ce groupe doit avoir son “identité propre” dans le pays d’origine.

Sur ce point, la Cour constate que les femmes peuvent être perçues d’une manière différente par la société environnante et se voir reconnaître une identité propre dans cette société, en raison notamment de normes sociales, morales ou juridiques ayant cours dans leur pays d’origine.

La Cour précise que l’appartenance à un groupe social doit être appréciée indépendamment des actes de persécutions dont sont victimes les membres de ce groupe, mais ces actes peuvent constituer un facteur pertinent d’identification.

Les femmes peuvent donc effectivement prétendre au statut de réfugié “lorsqu’il est établi que, dans leur pays d’origine, elles sont, en raison de leur sexe, exposées à des violences physiques ou mentales, y compris des violences sexuelles et des violences domestiques“ (§ 57).

2️.- La Grande Chambre précise également l’articulation des conditions permettant la reconnaissance du statut de réfugié.

Cette reconnaissance suppose qu’un lien soit établi entre, d’une part, les motifs de persécution et, d’autre part, soit les actes de persécution, soit l’absence de protection, par les acteurs étatiques de la protection, contre des actes de persécution perpétrés par des “acteurs non étatiques”.

Ainsi, le statut de réfugié peut être reconnu lorsque l’acte de persécution repose sur un des motifs de persécutions, quand bien même l’absence de protection ne reposerait pas sur ces motifs.

Il en est de même lorsque l’absence de protection repose sur un des motifs de persécutions, quand bien même l’acte de persécution ne reposerait pas sur un de ces motifs.

Il n’est donc pas nécessaire d’établir un lien entre les motifs de persécutions et les actes de persécutions si un tel lien est établi entre les motifs de persécutions et l’absence de protection contre ces actes par les acteurs étatiques.

3️.- Enfin, la Grande Chambre précise les conditions dans lesquelles les femmes victimes de violences peuvent bénéficier d’une protection subsidiaire non seulement sur le fondement classique du risque de “torture ou de traitements inhumains et dégradants”, mais également sur le fondement du risque d’ “exécution”.

Ainsi, lorsqu’une femme court un risque réel d’être tuée par un membre de sa famille ou de sa communauté au motif de la transgression supposée de normes culturelles, religieuses ou traditionnelles, une telle atteinte grave doit être qualifiée d’”exécution”.

Si les actes de violences auxquels elle risque d’être exposée n’ont pas pour conséquence probable la mort, ces actes doivent être qualifiés de “torture ou de traitements ou sanctions inhumains ou dégradants”.

🟢 Cette décision apporte ainsi des précisions importantes sur l’interprétation au niveau européen de la directive 2011/95, qui tendent vers une meilleure protection des femmes victimes de violences dans leur pays d’origine.

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